Doc:Psyché et Éros : Analyse 3

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Analyse 2

Sommaire

Découverte de Cupidon

Psyché découvre que celui qu'elle ne devait pas voir, puis prit ensuite pour un monstre, n'est en définitive autre que Cupidon. Lequel s'enfuit, abandonne Psyché qui s'est accrochée à lui. Elle décide alors de mettre fin à ses jours.
Notons que ce passage nous révèle qu'Éros a désobéi à sa mère en ce qui concerne la blessure (d'amour) qu'il devait infliger à Psyché parce qu'il est lui-même victime de l'amour. Jusqu'ici, le lecteur était censé penser que Psyché vivait en effet avec un monstre suivant la prophétie de l'oracle, en réalité ordre de Vénus.
Sauvée de son suicide par le fleuve, conseillée par Pan, Psyché décide de vivre et retrouver son Amour.

Cupidon apparaît à Psyché

(2) Mais à l'instant la couche s'illumine, et voilà ses mystères au grand jour. Psyché voit (quel spectacle !) le plus aimable des monstres et le plus privé, Cupidon lui-même, ce dieu charmant, endormi dans la plus séduisante attitude. Au même instant la flamme de la lampe se dilate et pétille, et le fer sacrilège reluit d'un éclat nouveau. (3) Psyché reste atterrée à cette vue, et comme privée de ses sens. Elle pâlit, elle tremble, elle tombe à genoux. Pour mieux cacher son fer, elle veut le plonger dans son sein ; (4) et l'effet eût suivi l'intention, si le poignard, comme effrayé de se rendre complice de l'attentat, n'eût échappé soudain de sa main égarée. Elle se livre au désespoir ; mais elle regarde pourtant, et regarde encore les traits merveilleux de cette divine figure, et se sent comme renaître à cette contemplation. (5) Elle admire cette tête radieuse, cette auréole de blonde chevelure d'où s'exhale un parfum d'ambroisie, ce cou blanc comme le lait, ces joues purpurines encadrées de boucles dorées qui se partagent gracieusement sur ce beau front, ou s'étagent derrière la tête, et dont l'éclat éblouissant fait pâlir la lumière de la lampe. (6) Aux épaules du dieu volage semblent pousser deux petites ailes, d'une blancheur nuancée de l'incarnat du coeur d'une rose. Dans l'inaction même, on voit palpiter leur extrémité délicate, qui jamais ne repose. (7) Tout le reste du corps joint au blanc le plus uni les proportions les plus heureuses. La déesse de la beauté peut être fière du fruit qu'elle a porté.

Psyché piqué par une flèche de l'Amour

(V, 23, 1) Au pied du lit gisaient l'arc, le carquois et les flèches, insignes du plus puissant des dieux. La curieuse Psyché ne se lasse pas de voir, de toucher, d'admirer en extase les redoutables armes de son époux. Elle tire du carquois une flèche, (2) et, pour en essayer la trempe, elle en appuie le bout sur son pouce ; mais sa main, qui tremble en tenant le trait, imprime à la pointe une impulsion involontaire. La piqûre entame l'épiderme, et fait couler quelques gouttes d'un sang rosé. (3) Ainsi, sans s'en douter, Psyché se rendit elle-même amoureuse de l'Amour. De plus en plus éprise de celui par qui l'on s'éprend, elle se penche sur lui la bouche ouverte, et le dévore de ses ardents baisers. Elle ne craint plus qu'une chose, c'est que le dormeur ne s'éveille trop tôt.

Une goute d'huile de la lampe réveille Éros

(4) Mais tandis qu'ivre de son bonheur, elle s'oublie dans ces transports trop doux, la lampe, ou perfide, ou jalouse, ou (que sais-je ?) impatiente de toucher aussi ce corps si beau, de le baiser, si j'ose le dire, à son tour, épanche de son foyer lumineux une goutte d'huile bouillante sur l'épaule droite du dieu. (5) O lampe maladroite et téméraire ! ô trop indigne ministre des amours ! faut-il que par toi le dieu qui met partout le feu connaisse aussi la brûlure ! par toi, qui dus l'être sans doute au génie de quelque amant jaloux des ténèbres, et qui voulait leur disputer la présence de l'objet adoré !

Constatant le secret trahi, Cupidon choisit de s'enfuir

(6) Le dieu brûlé se réveille en sursaut. Il voit le secret trahi, la foi violée, et, sans dire un seul mot, il va fuir à tire d'aile les regards et les embrassements de son épouse infortunée.

Révélations d'Éros ayant trahi sa mère par amour de Psyché (s'étant piqué lui-même d'une de ses flèches)

(V, 24, 1) Mais au moment où il se lève, Psyché saisit à bras-le-corps sa jambe droite, s'y cramponne, le suit dans son essor, tristement suspendue à lui jusqu'à la région des nuages ; et lorsqu'enfin la fatigue lui fait lâcher prise, elle tombe sans mouvement par terre. (2) Cupidon attendri répugne à l'abandonner en cet état : il vole sur un cyprès voisin ; et d'une voix profondément émue : (3) Trop crédule Psyché, dit-il, pour vous j'ai enfreint les ordres de ma mère. Au lieu de vous avilir, comme elle le voulait, par une ignoble passion, par un indigne mariage, je me suis moi-même offert à vous pour amant. (4) Imprudent ! je me suis, moi, si habile archer, blessé d'une de mes flèches, j'ai fait de vous mon épouse. Et tout cela, pour me voir pris pour un monstre, pour offrir ma tête au fer homicide, sans doute parce qu'il s'y trouve deux yeux trop épris de vos charmes. (5) J'ai tout fait pour tenir votre prudence éveillée. Ma tendresse a prodigué les avertissements ; mais sous peu j'aurai raison de vos admirables conseillères et de leurs funestes insinuations. Quant à vous, c'est en vous fuyant que je veux vous punir. En achevant ces mots, il se lance en oiseau dans les airs.

Tentative de suicide de Psyché

(V, 25, 1) Psyché prosternée sur la terre suivit longtemps des yeux son époux dans l'espace, tout en le rappelant par ses cris lamentables ; et quand un vol rapide l'eut élevé à perte de vue, elle se lève, et court se précipiter dans un fleuve voisin :

Aide du fleuve

(2) mais le fleuve eut compassion de l'infortunée, et, par respect pour le dieu qui fait enflammer même les ondes, par crainte peut-être, il la soulève sur ses flots, et la dépose pleine de vie sur le gazon fleuri de ses rivages.

Aide du dieu Pan

(3) Le rustique dieu Pan se trouvait là par hasard, assis sur la berge. Il tenait entre ses mains ces roseaux qui furent jadis la nymphe Canna, et les faisait résonner sur tous les tons ; son troupeau capricieux folâtrait, en broutant çà et là l'herbe du rivage. (4) Le dieu chèvre-pied, apercevant la belle affligée, dont l'aventure ne lui était pas inconnue, l'invite à s'approcher, et lui adresse quelques mots de consolation : (5) Ma belle enfant, je ne suis qu'un gardeur de chèvres, un peu rustre, il est vrai, mais j'ai beaucoup vécu et acquis raisonnablement d'expérience ; or, si je sais bien former mes conjectures (ce que les gens de l'art appellent être devin), cette démarche égarée et chancelante, cette pâleur universelle, ces continuels soupirs, et surtout ces yeux noyés dans les larmes, tout cela me dit que vous souffrez du mal d'amour. (6) Croyez-en mon conseil, renoncez à chercher la mort dans les flots ou par toute autre voie ; séchez vos pleurs, défaites-vous de cet air chagrin, offrez vos prières avec ferveur au grand dieu Cupidon, et, comme c'est un enfant gâté, sachez le prendre et flatter ses fantaisies.

(V, 26, 1) Ainsi parla le dieu pasteur. Psyché ne répondit rien ; elle s'inclina devant le dieu, et se mit en marche.

Psyché se venge de ses sœurs

Poussée par le hasard (ou plutôt la nature qui l'accompagne tout au long de ce périple), Psyché arrive chez chacune de ses sœurs et use d'un stratagème pour s'en débarrasser.

Arrivée chez l'une des sœurs

Après avoir longtemps et péniblement erré à l'aventure, elle se trouve dans un sentier en pente, qui la mène inopinément à la ville où régnait le mari d'une de ses sœurs.

Dessein de Psyché à l'égard de la première sœur

(2) Aussitôt qu'elle en fut informée, elle fait annoncer sa venue. Elle est introduite, et, après les baisers et les politesses d'usage, on lui demande son histoire. Psyché commence ainsi : (3) Il vous souvient du conseil que vous me donnâtes, d'accord avec notre autre sœur. Abusée, disiez-vous, par un monstre qui venait, se donnant pour mari, passer les nuits avec moi, il fallait, sous peine de servir de pâture à cette bête vorace, le frapper d'un poignard à deux tranchants, et j'y étais bien décidée ; (4) mais lorsque, toujours par votre conseil, j'approchai la lampe qui devait me découvrir ses traits, quel divin spectacle vint s'offrir à mes regards charmés ! c'était le fils de la déesse Vénus, Cupidon lui-même, endormi d'un paisible sommeil. (5) Éperdue, ivre de volupté, je cédais au délire de mes sens. (6) Tout à coup, ô douleur ! une goutte d'huile brûlante tombe sur son épaule ; il se réveille en sursaut ; et, voyant dans mes mains le fer et la flamme : Va, me dit-il, ton crime est impardonnable. Sors à jamais de mon lit ; plus rien de commun entre nous. (7) C'est ta sœur (et il prononça votre nom) que je veux désormais pour épouse. Il dit, et, sur son ordre, le souffle de Zéphyr me transporte hors du palais.

Mort de la première sœur

(V, 27, 1) Psyché n'avait pas fini de parler, qu'enivrée du succès de sa ruse, sa sœur brûle d'en recueillir les coupables fruits. Pour tromper son mari, elle feint qu'on vient de lui apprendre la mort de ses parents, s'embarque en toute hâte, et fait voile vers le rocher. (2) Zéphyr ne soufflait pas alors ; mais, dans l'espoir qui l'aveugle : Cupidon, dit-elle, reçois une épouse digne de toi ; et toi, Zéphyr, soutiens ta souveraine ! Et soudain elle s'élance de plein saut. (3) Mais elle ne peut même arriver morte où elle voulait aller ; car les saillies des rocs se renvoyèrent les débris de ses membres, et, par un sort trop mérité, les lambeaux dispersés de son corps devinrent à moitié chemin la pâture des bêtes féroces et des oiseaux de proie.

Même sort à la seconde sœur

(4) L'autre punition ne tarda guère. Psyché, continuant sa course vagabonde, arriva dans la ville où résidait sa seconde sœur. (5) Celle-ci, dupe de la même fiction, et rêvant comme sa devancière le criminel honneur de supplanter sa cadette, courut vite au rocher et y trouva même fin.

Cupidon malade chez sa mère, laquelle veut retrouver Psyché

Vénus accepte difficilement la maladie d'Amour de son fils qu'elle gronde et menance de le renier.
Vénus demande l'aide de Junon et Cérès pour retrouver Psyché. Les deux déesses tentent de lui faire accepter l'amour réciproque de Psyché et son fils.

La maladie d'amour d'Amour

(V, 28, 1) Pendant que Psyché courait ainsi le monde à la recherche de Cupidon, Cupidon, malade de sa brûlure, gémissait couché sur le lit même de sa mère.

La mouette annonce à Vénus que son fils est épris de Psyché

(2) Or, cet oiseau blanc qui rase de l'aile la surface des mers, plongeant dans les profondeurs de l'Océan, va trouver Vénus, (3) qui se baignait en se jouant au milieu des flots. Il lui annonce, en l'abordant, que son fils s'est fait une grande brûlure, dont la guérison est incertaine. (4) Il ajoute que les bruits les plus fâcheux se répandent sur elle et sur sa famille : La mère et le fils, disait-on, ne sont plus occupés, l'un que d'une intrigue d'amour sur une montagne, et l'autre que du plaisir de nager au fond des mers. (5) Adieu la volupté, adieu les grâces, adieu les jeux et les ris. Tout s'enlaidit, se rouille, s'assombrit dans la nature ; plus de tendres noeuds, de commerce d'amitié, d'amour filial. Le désordre règne ; ce n'est plus qu'une dissolution générale, un affreux dégoût de tout ce qui entretient l'union et fait le charme de la vie. (6) La volatille babillarde n'oublia rien dans son rapport de ce qui pouvait irriter Vénus contre son fils. (7) Ah ! dit la déesse irritée, mon bon sujet de fils a fait une maîtresse ! Voyons, toi, seule créature qui me montres du zèle, dis-moi le nom de la femme assez osée pour faire les avances à un enfant de cet âge. Est-ce une des Heures, une Nymphe, une Muse, ou l'une des Grâces de ma suite ? (8) L'oiseau jaseur n'eut garde de se taire. Maîtresse, je ne sais trop, répondit-il ; mais il y a de par le monde une jeune fille du nom de Psyché, si je ne me trompe, dont on le dit passionnément épris. (9) Qui ? s'écria Vénus tout à fait outrée, cette Psyché qui se mêle d'être aussi belle que moi ? qui s'ingère de porter mon nom ? C'est celle-là qu'il aime ? Ce marmot, apparemment, s'est servi de moi comme entremetteuse ! c'est moi qui lui aurai mis le doigt sur cette donzelle !

Vénus gronde et menace son fils

(V, 29, 1) Tout en grondant, elle sort précipitamment des ondes, et se dirige vers la couche d'or où repose le dieu malade. De la porte, elle lui crie de sa plus grosse voix : (2) Belle conduite, en vérité, pour un enfant discret et sage ! Est-ce là le cas que vous faites des ordres d'une mère, d'une souveraine ? Au lieu de livrer mon ennemie à d'ignobles amours, (3) vous osez, enfant libertin, lui prodiguer vos caresses précoces, et chercher dans ses bras des plaisirs défendus à votre âge ! Vous prétendez m'imposer pour bru la femme que je déteste ! (4) Ah çà, croyez-vous, petit drôle, séducteur avorton, enfant insupportable, que seul vous soyez en état d'avoir lignée et que moi je sois hors d'âge ? Oh bien ! (5) Sachez que je veux avoir un fils qui vous remplacera, et qui vaudra mieux que vous. Tenez, afin que l'affront soit plus sensible, j'adopterai quelqu'un de mes serviteurs, et je le doterai de ces ailes, de ce flambeau, de cet arc et de ces flèches, que je vous avais confiés pour un meilleur usage ; car tout cet équipement m'appartient, (6) et il n'en est pas une pièce qui vous vienne de votre père.

(V, 30, 1) On vous a gâté dès l'enfance : vos mains n'ont jamais su qu'égratigner et battre ceux à qui vous devez le respect. Moi-même, moi, votre mère, enfant dénaturé, ne suis-je pas journellement volée par vous, et quelquefois battue ? Vous n'en useriez pas autrement avec moi si j'étais veuve ; et votre beau-père, ce grand et formidable guerrier, ne vous impose même pas. (2) Je le crois bien, au surplus : pour me faire enrager, vous vous êtes mis sur le pied de lui procurer de bonnes fortunes ; mais le jeu vous coûtera cher, et ce beau mariage ne sera pas tout roses pour vous, je vous le promets. (3) Suis-je assez bafouée ? Que faire ? que résoudre ? Comment avoir raison de ce petit vaurien ? Irai-je mendier le secours de la Sagesse, elle qui m'a vue si souvent lui rompre en visière, toujours pour les frasques de ce mignon ? (4) La créature, d'ailleurs, la plus désobligeante et la plus mal peignée... ! Ah ! j'en ai le frisson ; mais il est si bon de se venger, coûte qui coûte ! (5) Allons, j'irai trouver la Sagesse, oui, la Sagesse. Du moins, mon fripon sera châtié de main de maître. Elle videra son carquois, désarmera ses flèches, détendra son arc, éteindra son flambeau, et ne ménagera pas non plus sa petite personne. (6) Je ne serai point satisfaite qu'elle n'ait et rasé cette chevelure dorée que j'ai si souvent peignée de mes propres mains, et rogné ces ailes, autrefois arrosées du nectar de mon sein.

Vénus rencontre Junon et Cérès

(V, 31, 1) Elle dit, et sort furieuse, tout en continuant d'exhaler sa bile. Elle est accostée par Junon et Cérès, qui, la voyant le teint allumé, lui demandent pourquoi ce sourcil froncé qui obscurcit le brillant de ses yeux. (2) Je vous rencontre à propos, leur dit-elle : la colère pourrait me porter à quelque excès ; mais, je vous en conjure, aidez-moi de tous vos efforts à retrouver cette Psyché qui s'est enfuie, envolée je ne sais où ; car vous n'en êtes pas à apprendre le scandale de ma maison, et les hauts faits de celui que je ne veux plus appeler mon fils.

Junon et Cérès prennent la défense d'Éros

(3) Les deux déesses, bien instruites de l'aventure, essayent d'apaiser la grande colère de Vénus. Mais, madame, qu'a donc fait votre fils, pour motiver cet acharnement contre lui, et cette hostilité si violente contre celle qu'il aime ? (4) Où est le crime, s'il vous plaît, de faire les yeux doux à une jolie fille ? Vous n'ignorez pas qu'il est garçon sans doute, et, de plus, grand garçon ? Auriez-vous oublié la date de sa naissance ? ou, parce qu'il porte si gentiment ses années vous obstinez-vous à le voir toujours enfant ? (5) Vous, sa mère, vous, femme de sens, vous iriez d'un œil curieux épier ses amusements, lui faire un crime de ses petites fredaines, contrecarrer ses amourettes, et condamner enfin, dans ce beau jouvenceau, (6) vos propres gentilles pratiques, et les doux passe-temps que vous ne vous refusez pas ? Singulière prétention, d'aller semant l'amour partout, et de le prohiber dans vos domaines ! d'exclure vos enfants du droit commun de prendre part aux faiblesses du beau sexe ! Ah ! l'on ne vous la passera pas, ni au ciel, ni sur la terre. (7) Ainsi les officieuses déesses prennent la défense de l'absent, dont elles redoutent les flèches ; mais Vénus, qui n'entend pas raillerie sur les torts dont elle se plaint, leur tourne le dos, et précipite ses pas vers la mer.

Psyché décide de rencontrer Vénus, laquelle continue de la chercher

Au cours d'une errance sans sommeil, Psyché rencontre Cérès puis Junon à qui elle demande protection sans l'obtenir. Ce qui la décide à aller au devant de Vénus.
Rendant visite à Jupiter, Vénus demande les services de Mercure pour lui ramener Psyché.
Notons que les intentions de Vénus motivant cette recherche de Psyché restent floues.
Mercure parcourt la terre pour retrouver Psyché promettant sept baisers de Vénus en récompense à qui l'aidera.

Psyché met de l'ordre

(VI, 1, 1) Psyché cependant allait errant à l'aventure. Jour et nuit elle cherche son époux; le sommeil la fuit, et sa passion s'en exalte encore. Il s'agit pour elle non plus d'attendrir un époux, mais de désarmer un maître. (2) Au sommet d'une montagne escarpée, elle aperçoit un temple. Qui sait ? dit-elle, peut-être est-ce là le séjour de mon souverain seigneur : et la voilà, oubliant ses fatigues, qui court d'un pas rapide vers ce but de son espoir et de ses voeux. (3) Elle gravit intrépidement la hauteur, et s'approche du sanctuaire. Elle y voit amoncelés des épis d'orge et de froment, dont une partie était tressée en couronne. (4) Il y avait aussi des faux et tout l'attirail des travaux de la moisson; mais tout cela pêle-mêle et jeté au hasard; comme il arrive quand l'excès de la chaleur fait tomber l'outil des mains au travailleur fatigué. (5) Psyché s'occupe aussitôt à débrouiller cette confusion, et à remettre chaque chose en ordre et en place, persuadée qu'il n'y a pour elle détail de culte ni observance à négliger, et qu'il n'est aucun dieu dont elle n'ait à se concilier la bienveillance et la pitié.

Psyché rencontre Cérès

(VI, 2, 1) Tandis qu'elle vaque à ce soin consciencieusement et sans relâche, arrive Cérès la nourricière, qui la trouve à l'ouvrage : Ah ! malheureuse Psyché, s'écria-t-elle, avec un soupir prolongé, (2) Vénus en courroux cherche par tout l'univers la trace de tes pas; elle veut ta mort; elle se vengera de tout son pouvoir de déesse et toi, je te trouve ici uniquement occupée de mon service, et ne songeant à rien moins qu'à ta propre sûreté ! (3) Psyché se prosterne aux pieds de Cérès, les inonde de ses larmes, et, balayant le sol de ses cheveux, implore la déesse sous toutes les formes de prières.

Psyché implore Cérès

(4) Par cette main prodigue des trésors de l'abondance, par les rites joyeux de la moisson, par votre attelage ailé de dragons obéissants, (5) par les fertiles sillons de la Sicile, par le char ravisseur, par la terre receleuse, par la descente de Proserpine aux enfers et son ténébreux hyménée, par la triomphante illumination de votre retour après l'avoir retrouvée, par tous les mystères enfin que le sanctuaire de l'antique Éleusis renferme et protège de son silence sacré, prenez en pitié la malheureuse Psyché qui vous supplie; (6) souffrez que je me cache pour quelques jours dans cet amas d'épis. Ou ce temps suffira pour calmer le courroux de ma redoutable ennemie, ou je pourrai du moins retrouver mes forces, épuisées par tant de fatigues.

Cérès ne secourt pas Psyché mais la laisse fuir

(VI, 3, 1) Cérès lui répond : Je suis touchée de tes prières et de tes larmes, et je voudrais te secourir; mais Vénus est ma parente; c'est une ancienne amie, bonne femme d'ailleurs, que je ne veux en rien contrarier. (2) Il te faut donc sortir à l'instant de ce temple; et sache-moi gré de ne pas t'y retenir prisonnière.

Psyché arrive chez Junon

(3) Refusée contre son espoir, Psyché s'éloigne, emportant dans son coeur un chagrin de plus. Elle revenait tristement sur ses pas, quand son œil plongeant au fond d'un vallon, découvre un autre temple, dont l'élégante architecture se dessinait dans le demi-jour d'un bois sacré. Décidée à ne négliger aucune chance, même douteuse, de salut, et à se mettre sous la protection d'une divinité quelconque, elle s'avance vers l'entrée de l'édifice. (4) Là se présentent à sa vue les plus riches offrandes. Aux portes sacrées, ainsi qu'aux arbres environnants, étaient suspendues des robes magnifiques; et sur leur tissu la reconnaissance avait brodé en lettres d'or, avec le nom de la déesse, le sujet de chaque action de grâces qu'on lui rendait. Psyché fléchit le genou, embrasse l'autel tiède encore, et, après avoir essuyé ses larmes elle fait cette prière :

Psyché implore Junon

(VI, 4, 1) Épouse et soeur du grand Jupiter, toi qui habites un temple antique dans cette Samos, si fière d'avoir entendu tes premiers vagissements et de t'avoir vu presser le sein de ta nourrice; toi que l'altière Carthage, aux opulentes demeures, honore sous les traits d'une vierge traversant les airs avec un lion pour monture; (2) toi qui, sur les bords que l'lnachus arrose, présides aux murs de la célèbre Argos qui t'adore; et toi, la reine des déesses, l'épouse du maître du tonnerre; (3) toi que l'Orient vénère sous le nom de Zygie, et qu'invoque l'Occident sous celui de Lucine; ah ! montre-toi pour moi Junon protectrice ! La fatigue m'accable; daigne me préserver des dangers qui me menacent. Jamais, je le sais, tu ne refusas ta protection aux femmes sur le point d'être mères.

Refus de Junon

(4) Pendant cette invocation, Junon lui apparaît dans tout l'éclat de la majesté céleste. Je ne demanderais pas mieux, dit-elle, que d'accueillir ta demande; (5) mais me mettre en opposition avec Vénus ma bru, que j'aime comme ma fille, le puis-je vraiment avec convenance ? Et puis il y a des lois qui défendent de recueillir les esclaves fugitifs, et je n'irai pas y porter atteinte.

En désespoir de cause, Psyché décide de se rendre chez Vénus

(VI, 5, 1) Découragée de ce nouvel échec, et renonçant à suivre un mari qui a des ailes, Psyché se livre à de cruelles réflexions. (2) Où chercher du secours, quand des déesses même ne me témoignent qu'une bonne volonté stérile ? (3) Où porter mes pas, quand tant de pièges m'environnent ? Quel toit, quelle retraite assez obscure pour me cacher à l'œil inévitable de la toute-puissante Vénus ? Allons, Psyché, une résolution énergique ! plus d'illusions frivoles. Va, de toi-même, te remettre aux mains de ta souveraine : ta soumission, pour être tardive, peut encore la désarmer. (4) Qui sait ? peut-être celui que tu cherches va-t-il se retrouver dans le palais de sa mère. Ainsi décidée à cette soumission hasardeuse, dût-elle y trouver sa perte, Psyché déjà préparait son exorde.

Vénus se rend au ciel

(VI, 6, 1) Cependant Vénus, qui a épuisé tous les moyens d'investigation sur terre, en va demander au ciel. Elle ordonne qu'on attelle son char d'or, œuvre merveilleuse de l'art de Vulcain, qui lui en avait fait hommage comme présent de noces. La riche matière a diminué sous l'action de la lime; mais, en perdant de son poids, elle a doublé de prix. (2) De l'escadron ailé qui roucoule près de la chambre de la déesse, se détachent quatre blanches colombes; elles s'avancent en se rengorgeant, et viennent d'un air joyeux passer d'elles-mêmes leur cou chatoyant dans un joug brillant de pierreries. (3) Leur maîtresse monte; elles prennent gaiement leur vol; une nuée de passereaux folâtres gazouillent autour du char. D'autres chantres des airs, au gosier suave, annoncent, par leurs doux accents, l'arrivée de la déesse. (4) Les nuées lui font place; le ciel ouvre ses portes à sa fille chérie, et l'Empyrée tressaille d'allégresse à sa venue. L'harmonieux cortège défile, sans avoir à craindre la rencontre de l'aigle, ni du vorace épervier.

Vénus sollicite de Jupiter l'aide de Mercure pour retrouver Psyché

(VI, 7, 1) Vénus va droit à la royale demeure de Jupiter, et la fière solliciteuse demande hardiment qu'il lui prête le ministère de Mercure; car il lui faut la meilleure poitrine de l'Olympe. (2) Signe d'assentiment des noirs sourcils. Vénus revient triomphante, et, tout en descendant des cieux avec Mercure, lui dit d'un ton animé : (3) Mon frère l'Arcadien, vous savez que votre soeur Vénus ne fait jamais rien sans vous; vous n'ignorez pas non plus que je suis en quête d'une esclave à moi qui se cache, et que je perds mon temps à la chercher. Je n'ai plus qu'une ressource, c'est de faire proclamer que je promets récompense à qui la trouvera. (4) Je compte sur vous pour me rendre, sans tarder, ce bon office. Surtout que son signalement soit clair et précis. S'il y a lieu plus tard de poursuivre quelque receleur en justice, qu'on ne puisse prétexter cause d'ignorance. (5) Là-dessus, elle remet par écrit à Mercure le nom de Psyché avec les indications nécessaires, et regagne son palais.

Recherche de Psyché par Mercure

(VI, 8, 1) Mercure, empressé de s'acquitter de la commission, se met à parcourir la terre, proclamant partout ce qui suit :

(2) « On fait savoir qu'une fille de roi, du nom de Psyché, esclave de Vénus, a pris la fuite. Quiconque pourra la livrer, ou indiquer sa retraite, (3) recevra pour sa peine sept baisers de la bouche même de Vénus; plus, un huitième, emmiellé de ce que ses lèvres ont de plus doux. S'adresser pour la réponse au crieur Mercure, derrière les Pyramides Murciennes.»

(4) À cette annonce, on juge quelle excitation l'espoir d'un pareil prix dut produire chez les mortels. Cette circonstance acheva de détruire toute irrésolution dans l'esprit de Psyché.

Psyché arrive chez Vénus

Psyché, arrivée chez Vénus, est accueillie par l'Habitude qui l'insulte et la violente.
Notons que Psyché, pour la deuxième fois, est considérée comme une esclave de Vénus qui se serait évadée.
Vénus accueille Psyché en l'appelant belle-fille. Elle la remet d'abord aux mains de l'Inquiétude et la Tristesse qui la fustigent, puis, à son tour, la bat violemment. Elle refuse que l'enfant porté par Psyché devienne son petit-fils, évoquant même la possibilité qu'elle ne le laisse pas naître.

Psyché accueillie par l'Habitude

(5) Déjà elle approchait des portes de sa maîtresse; l'Habitude, une des suivantes de Vénus, accourt, en criant du plus haut ton de sa voix :

(6) « Te voilà donc, servante détestable ! Enfin tu te souviens que tu as une maîtresse ! Ne vas-tu pas, avec l'effronterie dont tu es pourvue, feindre d'ignorer quelle peine nous avons eue à courir après toi ? (7) Par bonheur, c'est dans mes mains que tu tombes ; autant vaudraient pour toi les griffes de l'enfer. Ah ! tu vas recevoir le prix de ta rébellion.»

(VI, 9, 1) Et, la saisissant par les cheveux, elle entraîne la pauvrette, qui n'oppose aucune résistance.

Psyché à la merci de Vénus

En voyant sa victime devant elle, et comme offerte à ses coups, Vénus poussa un grand éclat de rire; de ce rire que produit souvent l'excès de la colère.

Vénus se désigne comme belle-mère de Psyché

(2) « Enfin, dit-elle, en secouant la tête et se frottant l'oreille droite, vous daignez venir saluer votre belle-mère. N'est-ce pas à votre mari, malade par votre fait, que s'adresse l'honneur de votre visite ? Oh ! soyez tranquille ; on vous traitera comme le mérite une aussi estimable belle-fille. Où sont, dit-elle, mes deux servantes, l'Inquiétude et la Tristesse ? »

l'Inquiétude et la Tristesse fustigent Psyché

(3) On les introduit ; et Vénus livre Psyché à leurs mains cruelles. Suivant l'ordre qu'elles ont reçu, elles la frappent de verges, la torturent de mille manières, puis la ramènent en présence de leur maîtresse.

Rejet par Vénus du petit-fils à venir

(4) Vénus se mit de nouveau à rire. Oh ! voici, dit-elle, un gros ventre bien fait pour me disposer à la commisération. Cette belle progéniture va faire de moi une si heureuse grand-mère ! Grand-mère ! (5) n'est-ce pas bien réjouissant de s'entendre donner ce nom, et d'avoir pour petit-fils l'enfant d'une vile servante ? (6) Mais je suis folle, en vérité, d'appeler cela mon fils. Ce mariage disproportionné, consommé dans une campagne, sans témoins, sans le consentement du père, ne saurait être légitime. Le marmot sera bâtard, supposé que je lui donne le temps de naître.

Vénus bat Psyché

(VI, 10, 1) En proférant ces mots, elle s'élance sur la pauvre Psyché, met sa robe en pièces, lui arrache les cheveux, et lui meurtrit de coups la tête.

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Analyse 4

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